Peut-on (doit-on) imaginer une gastronomie

sans produit animal ?

Après l’Oregon, nous découvrons la Californie. Nous quittons ses grandes forêts de pins et son brouillard

pour un climat plus sec, de nouvelles couleurs mais aussi un trafic plus dense !

La Californie est le berceau des tendances Food de demain. Végétariens, végétaliens, sans gluten, crudivores ou frugivores, ne sont déjà plus des nouvelles pratiques ici mais des habitudes déjà bien ancrées dans le paysage local.

 

Pour un « omnivore accompli », il n’est pas toujours évident de décrypter ce qui se cache derrière ces termes. Alors quelle différence entre végétariens, végétaliens et vegans ?

Éléments de définition :

Végétarien : régime sans viande (rouge et blanche), sans poissons, ni fruits de mer.

Végétalien : régime qui ne comporte que des éléments issus du monde végétal. Les végétaliens ne mangent donc ni viande, ni poissons, ni fruits de mer mais ne consomment pas non plus des produits laitiers, œufs et autres produits issus du monde animal comme le miel. Très souvent les végétaliens ne se limitent pas aux produits qu’ils consomment mais optent pour le véganisme.

Véganisme : Le véganisme ne se réduit pas à une alimentation spécifique : il est avant tout un mode de vie. Le véganisme est une façon de vivre et un mode de consommation qui cherchent à exclure l’exploitation, la souffrance et la cruauté envers les animaux, que ce soit pour se nourrir, se vêtir, etc… Un vegan essaie de vivre sans faire souffrir les animaux. Par conséquent, il exclut tout produit qui porte atteinte aux animaux dans son alimentation, mais aussi dans les autres facettes de sa vie. Il ne porte pas de laine, pas de cuir ; il n’utilise pas de produits cosmétiques testés sur les animaux, etc…

Le Véganisme a le vent en poupe aux E.U, selon une étude du cabinet américain Report BuyerCélébrités, 6% des américains se revendiquent « vegan ». C’est encore plus marqué ici à Los Angeles, où célébrités et grands chefs font du Véganisme la nouvelle normalité.

C’est donc naturellement ici que nous voulions découvrir cette gastronomie et comprendre pourquoi et comment de nombreuses personnes imaginent un monde sans produit animal.

L’abattage des animaux pour fournir de la viande représente plus de 1900 animaux par seconde soit 60 milliards d’animaux tués chaque année, représentant 280 milliards de kilos (vs. 44 milliards en 1950) selon la FAO qui prévoit 110 milliards d’animaux tués chaque année en 2050. C’est beaucoup…non ?

Surtout quand on pense à l’impact considérable que l’élevage a sur les émissions de CO2 et sur notre santé. De là, à se passer de viande, de lait et d’œufs totalement, il y a un pas de géant à franchir pour beaucoup. « Mangeurs de graines, de légumes bouillis et de tofu », les vegan ne sont pas toujours perçus comme de fins gastronomes et des « bons vivants ». On avait très envie de confronter nos propres clichés avec ce qui se fait de mieux ici en Californie.

A San Francisco, plus exactement à Palo Alto au cœur de la Silicon Valley, une étudiante de Stanford, vient de lancer sa propre recette de « chicken wings » vegan en vue de les commercialiser. D’origine indienne, Mahak ne mange pas de viande depuis son enfance, ce qui est assez courant en Inde où 30% de la population, principalement pour des raisons religieuses, est végétarienne. Il est très facile là-bas de manger équilibrer sans viande. Arrivée aux États-Unis pour ses études, Mahak a voulu développer ses propres recettes, empreintes de culture américaine.

Elle a ainsi élaboré une alternative au poulet, constituée de 3 ingrédients : farine de soja, farine de blé et du Gluten de froment élastique. Cette préparation, riche en protéine imite assez bien la texture du poulet. Le goût vient principalement de l’assaisonnement qui est ajouté. A l’avenir, elle aimerait les vendre « crus » pour les restaurants et marinés prêts à déguster pour les particuliers.

On les a bien évidemment goûtés, tout comme on a mangé « l’Impossible Burger » dont tout le monde parle ici avec son imitation de steak (végétal bien sûr). Contrairement à l’Impossible Burger qui propose un produit ultra transformé (misant sur la chimie pour retrouver la texture de la viande), Mahak aimerait proposer un produit simple avec des ingrédients facilement reconnaissables.

On se pose tout de même la question de la nécessité d’imiter à ce point la viande quand on peut complètement réinventer une nouvelle gastronomie, meilleure pour la santé, pour la planète et pour les papilles !

A Los Angeles, nous rencontrons Mollie Angelheart, cheffe culinaire de 3 restaurants vegan « Sage Vegan Bistro » et propriétaire de la ferme « Sow a heart farm ». Elle propose un menu 100% vegan avec des produits issus à 90% de sa ferme et des fermes de la région. Et pourtant, nous apprenons que 80% de sa clientèle n’est pas vegan ! Elle l’affirme comme une victoire, car son but n’est pas de convertir tout le monde au véganisme mais de faire aimer cette cuisine à tout le monde, pour que régulièrement et naturellement, de plus en plus de gens mangent vegan sans en faire un acte exceptionnel ou militant. Les personnes qui aiment la viande n’arrêteront probablement pas de manger de la viande, mais ils peuvent ainsi en manger moins et de meilleure qualité.

A quelques kilomètres de là, Zena Scharf nous invite dans sa cuisine, sur les hauteurs de Los Angeles, pour nous faire découvrir une recette pleine de couleurs et de saveurs. Aucun produit transformé dans sa cuisine, uniquement des aliments frais qu’elle associe avec talent. Ce jour là, des petits cakes de Kabocha et champignons grillés sont accompagnés d’une délicieuse salade. Le sucré vient relever le salé, le froid se mêle au chaud. Il y a de la couleur, du croustillant et de la fraicheur, c’est beau et c’est bon !

En la dégustant nous pensons à Jay Z (vegan) et Beyoncé (vegan pour un régime) à qui elle a probablement servi ce plat, il y a quelques années, lorsqu’elle était leur cheffe personnelle. Et pourtant, cette passionnée de cuisine n’est pas vegan, mais aime surprendre ses invités et leur faire oublier le temps d’un repas qu’ils n’ont pas mangé de viande ni de produit animal.

On ne résiste pas à l’envie de lui demander sa recette et de vous la livrer ici :

Pour 6 gâteaux vegan :

  • 1 cup de courge kabocha rôtie (courge Japonaise proche du Potiron)
  • 1/2 cup de shiitake
  • 1/2 cup de maitake
  • 1/2 cup de champignons de Paris
  • 1,5 cup de quinoa cuit
  • 2 gousses d’ail
  • huile d’olive
  • 1 petit oignon
  • 2 cuillères à café d’acide aminé

Hacher les champignons et l’ail et les faire sauter avec de l’huile d’olive jusqu’à ce qu’ils soient presque croustillants. Laisser refroidir. Hacher menu à nouveau l’ensemble.

Couper les oignons en petits dés et les faire sauter à l’huile d’olive.

Mélanger le quinoa cuit avec les champignons et l’oignon cuit.

Couper en deux et faire rôtir au four la courge Kabocha pendant 20 min à 180°.

Réduire en purée la courge kabocha et l’ajouter lentement au mélange oignons-champignons.

Avec ce mélange, former des gâteaux d’environ 10 cm de diamètre.

Réfrigérer au moins 1 heure jusqu’à refroidissement. Rouler dans du panko (chapelure japonaise) si vous le désirez et cuire à la poêle.

Servir avec une belle salade croquante (tagliatelles de carottes et radis crus marinées dans du jus de citrons et du vinaigre de riz), des poivrons rôtis au four, des tranches de choux fleurs grillés à la sauce soja, un mélange riz/blé/fève, des rondelles d’oignons nouveaux, de la grenade et des fines tranches de kaki.

Une explosion de saveurs !

Nous terminons cet épisode en rencontrant Victoire Loup, critique culinaire française implantée en Californie depuis 3 ans. Ancienne responsable communication du Fooding à Paris, elle ne perçoit pas le veganisme ici comme une tendance mais bien comme une pratique ancrée de longue date. Plusieurs restaurants non vegan servent même des plats vegan sans pour autant le mentionner explicitement sur leur carte. C’est beaucoup plus rare en France où les plats sans produit animal sont souvent cantonnés aux restaurants vegan.

Nous quittons la Californie pour le Mexique avec quelques bonnes recettes vegan en poche, avant de nous attaquer au commerce équitable. Sujet de grande ampleur qui nous occupera pour les prochains mois en Amérique Central avec l’objectif de comprendre les enjeux et contraintes de ce commerce et comment il pourrait s’étendre plus facilement en France.

 

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6 Comments

Dassonville · 26 novembre 2018 at 9 h 52 min

Miam tout cela a l’air très bon ! 😉

Bernard H · 27 novembre 2018 at 11 h 23 min

Très bon résumé des différences entre végétarien, végétalien et vegan.
Toutefois si le concept vegan part d’une très bonne intention il ne tient pas compte de la biologie du corps humain qui a été chasseur cueilleur pendant des millénaires.
Vous n’allez pas mettre de l’éthanol dans une voiture diesel sous prétexte qu’il pollue moins que le gasoil. C’est pareil pour le corps humain qui a besoin de certaines molécules.
Remplacer une aile de poulet (qui peut être bio et élevé avec amour) par des produits de culture industrielle [soja qui contient du poison dans ses racines, blé qui a été depuis une centaine d’années modifié génétiquement (cf Julien Venesson), gluten lorsque l’on sait les intolérances] est dangereux pour la santé.
Si le vegan était la solution idéale il n’y aurait pas chez eux de problèmes de maladie de civilisation, de difficultés de fonctionnement du cerveau, de règles précoces chez les petites filles (cf Lierre Keith).
Se priver du miel et des produits de la ruche sous prétexte que cela vient du monde animal reviendrait dans la même logique à refuser les produits du jardin (il ne faut pas déranger les vers de terre et autres micro-organismes qui participent à la santé du jardin).
Le Dr Paul Carton qui est à l’origine du végétarisme en France au début du 20ème siècle avait une vue globale et a publié des livres sur les maladies, la santé, la cuisine, le jardinage, la spiritualité et leurs répercussions sur le corps humain. Les problèmes de santé étaient dû, à cette époque, surtout à 3 aliments (l’alcool, le pain, le sucre industriel), auquel on peut rajouter maintenant toute la malbouffe chimique, le soja (eh oui!), l’huile de palme que l’on retrouve dans les magasins bios et dans les aliments vegan. En bref tout ce qui est surexploité, traité hors sol…
On ne mange pas pour une idéologie mais pour la santé de son corps, et à la longue le corps aura toujours le dernier mot.

    world.foodorama · 29 novembre 2018 at 1 h 55 min

    Merci pour ce complément ! On te rejoint tout à fait sur les déséquilibres que tout régime « radical » peut entrainer. Le propos de l’article, et notre point de vue ainsi que des personnes interviewées, n’est pas tant de passer d’une alimentation omnivore à une alimentation exclusivement vegan mais d’imaginer une gastronomie qui ne soit pas exclusivement focalisée sur des produits issus des animaux. L’idée étant ainsi de consommer moins de viande (régulièrement) mais surtout de meilleure qualité.

      Bernard H · 29 novembre 2018 at 4 h 59 min

      Merci pour votre réponse qui précise bien le cadre de vos documentaires.
      Bonne continuation et au plaisir et la joie de lire vos prochains reportages.

flaw · 9 décembre 2018 at 12 h 12 min

un documentaire intéressant sur l’impact de la consommation de viande excessive : cowspiracy. En tout cas ça donne envie de tester ces petites recettes! merci pour vos reportages!

    world.foodorama · 11 décembre 2018 at 16 h 35 min

    Oui nous avons nous même regardé ce documentaire et nous a fait changé de régime !! En espérant que ces recettes vous inspirent 🙂

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